La Cour constitutionnelle rend sa décision dans le dossier du magistrat Joseph Kploca. Quelques jours seulement après sa radiation, l’ex-magistrat Joseph Kploca avait saisi le jeudi 10 novembre 2022 la Cour constitutionnelle contre la décision n°001/CSM/-22 du 1ᵉʳ février 2022. Dans son recours en contestation contre cette décision, l’ex-magistrat reproche une violation du droit de la défense et des droits de l’homme. Il y expose qu'il a été traduit devant le Conseil supérieur magistrature (CSM) par le Garde des sceaux, ministre de la Justice et de la législation suite à deux plaintes déposées par monsieur Bertin Honvou et Georges Yéhoumé, pour d'une part, attribution et vente de parcelles litigieuses sur la base d'une décision rendue par lui-même, d'autre part, non-remboursement de sommes d'argent perçues à divers titres.
LIRE AUSSI : Cybercriminalité au Bénin : 05 ans de prison requis par la CRIET contre 02 commissaires de police et un avocat
Joseph Kploca soutient que bien qu'il ait expliqué clairement que tout était faux et ait demandé que l'on arrête la procédure pour approfondir l'instruction et lui permettre de se défendre, car les arguments présentés contre lui n'apparaissaient pas clairement dans le dossier mis à sa charge par le CSM. L'ex-magistrat ajoute qu'après deux comparutions devant le CSM, il a été suspendu de ses fonctions de conseiller à la Cour d'Appel d'Abomey pour des faits qu'il aurait commis en 2012 et 2013 avant de révoquer sans suspension de droit.
L'ex-magistrat demande sa réintégration
Dans son recours, Joseph Kploca précise qu'il a demandé l'arrêt de la procédure parce que, d’une part, le Garde des Sceaux, l’a accusé devant le CSM d’avoir tenté de reconstituer le dossier, objet du jugement sur la base duquel il a vendu les parcelles.
D’autre part, l'ex-magistrat affirme que ce dossier qui aurait été retrouvé au greffe a été dissimulé par le Garde des Sceaux qui ne l’a versé dans la procédure que lors de sa comparution devant le CSM alors qu’il aurait dû figurer dans le rapport disciplinaire mis à sa disposition.
Il précise qu’il a également demandé la production du procès-verbal de confrontation qu’il y a eue entre madame Ahissi VODOUNON et lui à la brigade criminelle, de même que l’audition de madame Yvette DJOSSA, du pasteur DURAND et du chef tontinier COSSI qui sont tous des témoins clés dans la plainte de monsieur Georges YEHOUME. Joseph Kploca a donc conclu que, pour avoir passé outre toutes ces demandes, le CSM et le Garde des Sceaux ont violé le principe du contradictoire et le droit de la défense, consacrés par l’article 7.1.c de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP) et la Constitution.
Après sa révocation le 1ᵉʳ février 2022, il indique par ailleurs que le Garde des Sceaux ne lui a notifié cette décision que le 08 novembre 2022, soit neuf (09) mois et sept (07) jours après la reddition de la décision en violation de l’article 20 alinéa 2 de la loi organique n°94-027 du 15 juin 1999 relative au CSM qui exige que la décision, soit notifiée au magistrat concerné en la forme administrative et dans un délai de trois (03) mois au plus tard à compter de la décision.
Il précise qu’il s’agit là également d’une forme de torture morale qui a fini par altérer sa santé physique et mentale d’autant que, pour les mêmes faits, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, l’avait fait comparaître auparavant à trois reprises à l'Inspection générale des services judiciaires puis à la brigade criminelle avec des menaces d’arrestation y compris devant le chef de l’Etat sans compter le stress continu auquel il l’a soumis après sa comparution devant le CSM le 1ᵉʳ février 2022 et les rumeurs de sa radiation qui ont fait de lui la risée de certains concitoyens.
En conséquence, il a demandé à la Cour de constater ces violations, d’ordonner sa réintégration et sa reprise de service, d’ordonner que le CSM délibère sur son affectation à la Cour suprême en tant que conseiller que le Garde des sceaux a empêchée.
Pas de violation de la Constitution et incompétence
En réponse, le CSM, par l’organe de son Secrétariat général, a transmis à la Cour une copie de la décision querellée. Dans sa décision, la Cour constitutionnelle a déclaré qu'il n'y a pas de violation de la Constitution dans la procédure de radiation du corps de la magistrature de monsieur Joseph Kploca. La Cour s'est également déclarée incompétente pour statuer sur l'article 20 alinéa 2 de la loi organique n°94-027 du 15 juin 1999 relative au Conseil supérieur de la magistrature.
Les sages de la Cour constitutionnelle ont basé leur décision sur les articles 18 alinéa 1, 114 et 117 de la Constitution, 4, 5 et 7-I-c de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP). L’article 7.1.c de la CADHP dispose que : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend... le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ».
“Considérant que le requérant soutient que l’argument selon lequel il a tenté de reconstituer le dossier, objet du jugement querellé, est un élément nouveau qui n’a été versé au dossier que le jour de sa comparution devant le CSM ; qu’il ressort toutefois du dossier, notamment de ses propres écrits que, dans le rapport disciplinaire mis à sa disposition, il est « insinué qu’il a commis un faux, parlant de la requête attribuée à la deuxième chambre de droit traditionnel des biens » ; qu’il affirme même qu’il a répliqué à cette insinuation en expliquant comment cette chambre qu’il tenait à l’époque était devenue la première chambre et comment les audiences qui se tenaient hebdomadairement ont commencé par se tenir par quinzaine, que, s'agissant de ses autres demandes, à savoir, la production du procès-verbal de confrontation qu'il y a eue entre madame Ahissi VODOUNON et lui à la brigade criminelle, l'audition de madame Yvette DJOSSA, du pasteur DURAND et du chef tontinier Cossi qui seraient tous des témoins clés dans la plainte de monsieur Georges YEHOUME, leur prise en compte relève de l'appréciation souveraine du CSM. Qu’il s'ensuit que, contrairement à ses allégations, il a été mis en mesure de se défendre et qu'il n'y a donc pas violation de la Constitution ”, indique la décision de la Cour constitutionnnelle.
Sur les cas de traitements inhumains et dégradants évoqués par l'ex-magistrat, la Cour souligne dans sa décision qu'il “n’apporte aucun certificat médical ni aucune autre preuve qu’il a subi une violence ou une atteinte à son intégrité physique et psychologique du fait d’un acte du Garde des Sceaux, ministre de la Justice, qu’il s’ensuit qu’en l’état, il n’y a pas violation de la Constitution”.
Commentaires
Hervé
Je veux 5000000
15-07-23 à 07:43