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Direct Procès-Affaire Dangnivo : Donatien Amoussou révèle comment le patron de la sécurité présidentielle de l'époque lui a demandé de remettre le téléphone de Dangnivo à Océan FM

Ce mardi 11 mars 2025, le procès très attendu de l'affaire Dangnivo s'ouvre devant le tribunal de première instance de première classe de Cotonou, siégeant en matière criminelle. Cinq ans après la réouverture de cette affaire, les accusés Codjo Cossi Alofa et Donatien Amoussou comparaissent enfin pour répondre des chefs d'accusation d'assassinat et de complicité d'assassinat d'Urbain Pierre Dangnivo.

Le sceau de la justice béninoise

Le sceau de la justice béninoise

Urbain Pierre Dangnivo, un cadre du ministère des Finances, avait mystérieusement disparu dans la nuit du 17 au 18 août 2010. Sa voiture, une Audi 80 blanche, avait été retrouvée abandonnée. Ce n'est que des jours plus tard que l'enquête policière a permis d'interpeller Codjo Cossi Alofa et Donatien Amoussou, soupçonnés d'être impliqués dans la disparition du fonctionnaire.

 

Le procès initial de cette affaire avait débuté en 2015 puis en 2016 et 2018. À l'époque, Codjo Cossi Alofa, présenté comme un féticheur, avait dans un premier temps reconnu les faits et plaidé coupable de l'assassinat. Mais lors des audiences de 2018, il était revenu sur ses aveux, affirmant qu'il était en garde à vue au moment des faits. Son co-accusé Donatien Amoussou avait quant à lui toujours nié les accusations de complicité d'assassinat.


 

Après des débats houleux et de nombreuses zones d'ombre, le tribunal avait finalement décidé de renvoyer le dossier pour complément d'enquête en 2018. Sept ans plus tard, le dossier est de nouveau prêt à être examiné et le procès s'ouvre ce mardi 11 mars 2025.


 

Codjo Cossi Alofa et Donatien Amoussou seront à nouveau à la barre pour répondre aux questions du tribunal. L'accusé principal, Codjo Cossi Alofa, devra notamment s'expliquer sur ses déclarations contradictoires. En 2018, il avait affirmé avoir été "mis en scène" par des hommes en uniforme pour reconnaître les faits, avant de se rétracter.


 

Les avocats de la défense auront la lourde tâche de convaincre le tribunal du bien-fondé de ces déclarations. De leur côté, les avocats de la partie civile représentant la famille de la victime, Urbain Pierre Dangnivo, comptent bien obtenir justice et la condamnation des accusés.


 

A 10 heures 19 minutes, les accusés dans ce dossier sont déjà présents dans la salle d’audience du tribunal de Cotonou. Des membres de la famille de Pierre Urbain Dangnivo sont présents. Des avocats tels que Me Olga Annassidé, Me Théodore Zinflou sont là. Des journalistes et des curieux sont aussi présents. Ils attendent l’arrivée des juges. A 10 heures 30 minutes, l’audience n’a pas encore débuté, rapporte l'envoyé spécial de Libre Express. L'audience s'est ouverte à 10 heures 44 minutes.

 

LIRE AUSSI : Affaire Dangnivo au Bénin : le procureur du tribunal de Cotonou donne des détails sur l'organisation du procès
 

Les enjeux de ce procès sont importants pour le Bénin. L'affaire Dangnivo a défrayé la chronique et suscité une vive émotion dans le pays. Après de longues années d'attente, l'opinion publique attend désormais des réponses sur les circonstances de la disparition du fonctionnaire. Les audiences, qui s'annoncent tendues, seront suivies avec une grande attention. 

 

L'accusé Alofa affirme avoir reçu une proposition de 25 millions FCFA pour endosser la responsabilité de l'assassinat de Dangnivo

10 heures 45 minutes : à l’ouverture du procès, le président du tribunal de Cotonou convoque les deux accusés à la barre. Codjo Alofa est poursuivi pour assassinat et Amoussou Donatien pour asssassinat. Le juge rappelle que c'est la nouvelle loi votée en 2018 qui permet au tribunal siégeant en première instance en matière criminelle de connaître à nouveau du dossier. Le président de céans affirme que le procès de ce mardi 11 mars 2025 n'est qu'une suite du procès ouvert depuis plusieurs années. Il précise qu'il ne s'agit pas d'un nouveau procès et fait savoir qu'il n'y a pas d'actes posés dans le dossier depuis 2018. Le magistrat convoque les témoins. Parmi eux, plusieurs sont présents dont l'ex-officier de police Prince Alédji, rapporte l'envoyé spécial de Libre Express.

10 heures 56 minutes : Me Olga Anassidé, avocat de la partie civile demande la liste de tous les témoins. Elle lui sera communiqué plus tard par le ministère public représenté par le procureur du tribunal de Cotonou. L’avocate fait ensuite des doléances au sujet des restes inhumés du présumé corps de Pierre Urbain Dangnivo à Womey qui ont été mis sous scellés. Elle demande à voir tous les actes posés dans ce cadre.

11 heures 6 minutes : Le présumé assassin de Pierre Urbain Dangnivo est à la barre. Le juge propose que les débats se déroulent en langue locale Fon. « Monsieur Alofa, connaissez-vous Pierre Urbain Dangnivo », lui demande le juge. Sa réponse est catégorique : « Non, je ne le connais pas ». « L'avez-vous vu une fois », a répliqué le président du tribunal de Cotonou. « Non, je ne l'ai jamais vu », affirme Alofa.

Si l’accusé ne connaît pas Pierre Urbain Dangnivo, comment s'est-il alors retrouvé au cœur du dossier comme son assassin ? L’accusé raconte au tribunal comment il s'est retrouvé au cœur de ce dossier devenu presque une affaire d'État.  Selon sa déposition, tout commence dans la nuit du 16 août 2010. Codjo Alofa raconte que lui et son ami Polo sont allés voler une moto. L’opération a tourné au vinaigre. Son ami Polo a réussi à prendre la clé des champs avec la moto. Mais lui a été rattrapé par la population et remis à la police. L’accusé affirme qu'il est gardé ensuite au commissariat de Godomey avant d'être placé sous mandat de dépôt le 30 août 2010. Plus tard, Codjo Alofa affirme que le 14 septembre 2010 alors qu'il est détenu à la prison civile de Cotonou, il s'est fait appeler par le régisseur, rapporte l'envoyé spécial de Libre Express.

Selon son témoignage, Codjo Alofa déclare que le régisseur lui a dit que ses patrons voulaient le voir. Il affirme que c'est là qu'il a vu des officiers dont un certain Prince Alédji. Il affirme que ce dernier serait venu avec un papier avec pour mission d’endosser la responsabilité de l’assassinat de Pierre Urbain Dangnivo. « Il m'a dit que quand quelqu'un dérange le président de la République, on s'occupe de lui. Il m'a dit que je n’avais pas à m'inquiéter. Je ne m'appelle pas Cossi Codjo Alofa. C'est Alédji qui m'a donné le nom Cossi. Je m'appelle Codjo Alofa et non Cossi Codjo Alofa », a-t-il confié. L’accusé affirme ensuite que de la prison civile de Cotonou, il a été ramené à la section recherches de la gendarmerie.  « Prince Alédji m'a demandé d'accepter que je suis l’assassin de Monsieur Urbain Dangnivo pour calmer Adrien Houngbédji et Bruno Amoussou qui organisaient des marches et menaçaient que l’élection présidentielle de 2011 n'allait pas tenir si Pierre Urbain Dangnivo n’était pas retrouvé », a révélé l’accusé. 

Au cours de sa déposition, Codjo Alofa affirme qu'il lui a été également promis 25 millions FCFA et la protection sécuritaire s'il acceptait d'endosser la responsabilité de l’assassinat de Pierre Urbain Dangnivo. L’accusé ajoute que plus tard, ils ont décidé de l’amener chez lui à Womey pour le prétendu corps et que bien avant un officier Lucien Dègbo lui a indiqué ce qu'il devrait dire avant la reconstitution. « Je ne maîtrise rien de ce dossier. Je n'ai pas tué Dangnivo», a rejeté l’accusé. « Le corps retrouvé chez moi a été amené là », a-t-il ajouté.

Alofa s'explique sur sa supposée évasion de la prison de Missérété en 2015

Au cours de sa déposition, l’accusé est revenu sur l’épisode de sa supposée évasion de la prison civile de Missérété en février 2015. À ce sujet, Codjo Alofa confie qu'après plus de deux ans de prison, des hommes armés sont venus le chercher très tôt à 4 heures un matin du mois de février 2015 pour soi-disant l’amener au parquet. Ces hommes armés lui auraient demandé s'il devait quitter le Bénin où irait-il. Alofa affirme qu'il a répondu qu'il irait au Togo. 

Le trajet de la prison au parquet lui a paru extrêmement long. Alofa déclare qu'il a été finalement déposé à la frontière de Hillacondji avec pour consigne d'aller très loin du Bénin.  Les hommes en uniforme qui l'ont déposé lui auraient remis 50 000 FCFA. Alofa précise au tribunal qu'il est resté au Togo pendant un moment avant de se rendre lui-même à la police togolaise et d'être extradé au Bénin.

13 heures 17 minutes : suspension de l'audience 

14 heures 17 minutes : Reprise de l’audience 

Quelques minutes après la reprise, des questions de précisions sont posées à l’accusé Codjo Alofa. 

Le présumé complice Donatien Amoussou révèle comment le patron de la sécurité présidentielle de l'époque lui a demandé d’aller remettre le téléphone de Dangnivo à Océan FM 

14 heures 32 minutes : l'accusé Donatien Amoussou, présenté comme complice, dépose. Le présumé complice de l’assassinat de Pierre Urbain Dangnivo va expliquer à la Cour comment il s'est retrouvé emprisonné depuis 2010 dans cette affaire. L’homme raconte qu'un jour, un ami camerounais du nom de Prison est venu l’informer qu'il avait retrouvé dans un hôtel un véhicule qui était recherché par les autorités. 

Donatien Amoussou déclare avoir fait appel à un de ses grand frère journaliste qui grâce à ses relations, l’a mis en relation avec le directeur général de l'ORTB de l'époque, Julien Akpaki. Selon sa déposition, c'est ce dernier qui l'a amené voir un colonel chargé de la sécurité du président pour l’informer qu'un véhicule a été retrouvé. Une fois informé, une enquête a été ouverte. 

Selon sa déposition, il ne savait pas que son malheur venait de commencer ainsi. Plus tard, le colonel Sévérin Koumassègbo, alors chef de la sécurité du président de la République, va convoquer Donatien Amoussou à son domicile. L’officier lui aurait remis un téléphone portable à déposer à la radio Océan FM et lui aurait demandé de signaler à la commission d'enquête qu'il avait retrouvé ce portable. Donatien Amoussou affirme avoir refusé, malgré l'offre de 500 000 FCFA. Le colonel a alors fait appeler une autre personne qui aurait accompli cette mission contre deux millions de FCFA.

Donatien Amoussou confie ensuite qu'il avait finalement coupé tout contact avec le colonel et a décidé de ne plus décrocher ses appels téléphoniques. Face à l’impossibilité de le joindre, Donatien Amoussou affirme que l’officier est passé par le biais de son grand-frère pour lui demander de venir. Finalement, l'accusé déclare s’être rendu chez le colonel à la présidence. Ce jour-là, le colonel lui a assuré qu'il ne lui demanderait plus de service. Peu de temps après, Donatien Amoussou affirme que le colonel l'a conduit à la compagnie de brigade où il sera placé en garde à vue. « Je n’ai pas été arrêté. Je suis venu et il m'a amené à la compagnie de brigade », a-t-il précisé.

Dans la salle d'interrogatoire pendant sa garde à vue, Donatien Amoussou confie que six autres personnes, torse nu, l'ont rejoint pour une séance d'identification. C'est au cours de cette séance d'identification que le principal accusé Alofa l'a désigné comme son complice. Donatien Amoussou affirme avoir été battu ce jour-là. « Je ne connais Dangnivo ni d'Adam ni d’Ève. Je vois Dangnivo dans cette salle, je ne peux pas le reconnaître. C'est plus tard que j'aie compris que le téléphone portable qu'on me demandait de remettre à Océan FM était celui de Dangnivo », a témoigné Donatien Amoussou.

L’audience est suspendue à 17 heures pour être reprise demain mercredi 12 mars 2025 à 09 heures.

FIN DU DIRECT

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