En prison sans jugement depuis près de cinq ans, un homme a saisi la Cour constitutionnelle. Placé en détention provisoire depuis le 15 mai 2020 et après plusieurs prolongations dépassant les délais légaux, Ousmane Dicko a saisi la Cour constitutionnelle du Bénin le 13 mai 2024 pour détention arbitraire, vices de procédure et violation de droits humains.
Son recours a été fondé sur l’argument que sa détention violait le droit à un procès équitable dans un délai raisonnable, conformément à la Constitution béninoise et aux conventions internationales. Dans son recours, Ousmane Dicko a souligné que sa détention provisoire est arbitraire au regard de l'article 6 de la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples (CADHP) qui stipule que « tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut être privé de sa liberté sauf pour des motifs et dans des conditions préalablement déterminées par la loi; en particulier nul ne peut être arrêté ou détenu arbitrairement ».
En vertu de la loi béninoise, la détention provisoire ne doit excéder 18 mois dans les affaires délictuelles, un délai largement dépassé dans son cas. Le requérant a été incarcéré en mai 2020, et malgré les prolongations successives de sa détention, aucune décision n'a été prise sur le fond de l'affaire.
En réponse, le président de la commission de l'instruction de la CRIET, par lettre du 11 juin 2024, fait observer que Ousmane Dicko est impliqué, avec trois autres personnes, « dans la procédure CRIET/2020/RP/00349 et COM-1/2020/RI/00230 pendante devant ladite commission pour des faits d'association de malfaiteurs, d'actes terroristes, d'enlèvement, de séquestration et d'extorsion de fonds ».
Il a aussi fait savoir d’une part que la procédure a été ouverte le 15 mai 2020 devant la chambre de jugement de la CRIET, qui s'est déclarée incompétente et a renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir et d’autre part « suite au réquisitoire définitif du 06 juin 2024 du parquet spécial portant disjonction, requalification et renvoi, la commission de l'instruction a rendu, le 11 juin 2024, un arrêt de clôture renvoyant le requérant et ses co-inculpés devant la chambre de jugement de la CRIET statuant en matière correctionnelle ».
Sa détention est arbitraire et contraire à la constitution
Se basant sur les dispositions de l'article 7.1. d) de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) qui stipule que « Toute personne a droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale », la Cour présidée par le Professeur Cossi Dorothé Sossa a estimé qu’il y a violation des droits fondamentaux de Ousmane Dicko, en particulier en ce qui concerne la durée excessive de sa détention, qui va à l'encontre des normes établies en matière de justice pénale.
« La détention provisoire du requérant est arbitraire et contraire à la Constitution. Il y a violation du droit du requérant d’être présenté à une juridiction de jugement dans un délai raisonnable », a conclu la Cour.
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