Le capitaine de vaisseau Jean Léon Olatoundji, ex-patron de la Marine, et le patron de la brigade fluviale de Karimama ont été entendus ce jeudi 10 octobre 2024 après trois précédentes audiences reportées. En effet, l’ex-patron de la Marine béninoise et son co-prévenu avaient déjà plaidé non coupables des chefs d'accusation d'abus de fonction, de complicité, d'abus de fonction et de contrebande mis à leur charge. Dans ce dossier, les avocats de la défense, dont Me Timothée Yabit avaient sollicité de la Cour la remise en liberté provisoire des prévenus.
Le motif ? Les deux prévenus n’ont pas été entendus sur les faits qui leur sont reprochés depuis l’ouverture du procès. L’avocat souligne que dans ces circonstances, la Cour ne pourrait pas rendre une décision sur la demande de remise en liberté provisoire.
L’officier supérieur donne sa version des faits
Un peu avant 11 heures à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), les deux prévenus ont été convoqués à la barre. À l’ouverture de l’audience, l'avocat Timothée Yabit a souligné à la Cour qu'elle ne pouvait pas se prononcer sur la demande de remise en liberté provisoire sollicitée par la Cour. Le motif ? L'avocat souligne que les prévenus n'ont pas été entendus sur les faits qui leur sont reprochés. Il explique qu’ik ne serait pas possible de rendre en l'état une décision sur la demande de liberté provisoire, rapporte l'envoyé spécial de Libre Express.
À la suite, le juge convoque immédiatement à la barre Jean-Léon Olatoundji. « Selon quels critères vous mettez les tickets valeurs à la disposition de vos agents à la base navale de Cotonou », lui lance le président de céans. Jean-Léon Olatoundji prend la parole : « Les unités expriment leur besoin en fonction des missions. Quand les besoins parviennent à mon cabinet, je les examine et nous délivrons les tickets valeurs en fonction des besoins».
À cette réponse, le juge l’interroge sur les carburants vendus à la base navale de Cotonou et qui font l’objet de procès devant la CRIET. Jean-Léon Olatoundji est catégorique : « Les bases navales sont autonomes. Je ne suis au courant de rien ». L’officier supérieur de la Marine béninoise explique que les bases étaient autonomes et que bien qu'il soit patron il ne se mêlait pas de la gestion de chaque base navale.
Face à cette réponse, le juge lui demande s'il n'a jamais servi à la base navale de Cotonou et comment le carburant volé était reparti. Jean-Léon Olatoundji lui expliquera qu'il a servi à la base navale de Cotonou entre 1992 et 1994. À l’époque, le prévenu déclare à la cour qu'il était un jeune officier et que par la suite il n'a plus servi à la base navale de Cotonou mais au cabinet de l’état-major de la Marine.
« On a vu dans les extraits que le commandant de la base navale de Cotonou (aujourd'hui en prison, ndlr) vous envoie des numéraires », demande le magistrat. Jean-Léon Olatoundji déclare à la Cour qu'en réalité, il commandait au commandant de la base du poisson pour ses besoins personnels. Il a rejeté catégoriquement ces allégations du président de céans.
Des transferts d'argent Momo du chef de la brigade fluviale de Karimama
L’ex-chef d'état-major a été interrogé sur les transferts d'argent mobile money qu'il a reçus de l’ex-chef brigade fluviale de Karimama. Jean-Léon Olatoundji reconnaît qu'il a reçu des transferts d'argent mobile money. Mais, il explique avoir interrogé le chef de la brigade fluviale de Karimama sur l’origine des fonds et que ce dernier lui aurait expliqués que l’argent provenait des organisations qu'ils ont mises en place à Karimama lors de la période du coup d'État de juillet 2023 au Niger voisin.
L'ex-patron de la Marine béninoise ajoute que ce chef faisait partie de l’opération Mirador et personne ne s'est jamais plaint de lui. Jean-Léon Olatoundji précise qu'il lui avait demandé de faire attention.
Interrogé sur les numéraires et tickets de valeurs reçus par son chef de cabinet, un certain Idjiwa, l'ex-chef d'état-major de la Marine affirme qu'il n’avait jamais fait une telle demande à son comptable. Jean-Léon Olatoundji précise qu'il a été chef d'état-major de la Marine béninoise pendant deux ans (avril 2022-avril 2024) et qu'il a à son actif un bilan positif de zéro incident enregistré en mer.
LIRE AUSSI : CRIET : l’audition de l’ex-commandant de la base navale de Cotonou révèle un présumé vol de 28 tonnes de carburant à la Marine
Sur les fonds envoyés par l’entreprise pétrolière Wapco, Jean-Léon Olatoundji souligne à la Cour que l’argent ne venait pas directement à la Marine. Selon sa déposition, l'argent allait directement dans la caisse de l’état-major général des Forces armées béninoises. Il apprend que c'est l'état-major général des Forces armées béninoises qui se charge ensuite de repartir les fonds par taux de pourcentage. Au niveau de la Marine béninoise, les fonds de Wapco servaient aux réparations ou maintenances imprévues et aux fonctionnements des unités, rapporte l'envoyé spécial de Libre Express.
Convoqué à la barre, l’un des proches collaborateurs de Jean-Léon Olatoundji a confirmé ses déclarations au sujet de son chef de cabinet Idjiwa. Il a déclaré que les tickets valeurs reçus par le chef de cabinet étaient conformes à la loi et que cela faisait partie de leur droit. Il a précisé que les comptes de fonctionnement de l’ex-chef d'état-major de la Marine béninoise ont toujours été vérifiés par les services de l’Etat et qu'il n'a jamais eu de problèmes.
Le chef de la brigade fluviale de Karimama s'explique
Après l’ex-patron de la Marine et son collaborateur, c'est le chef de la brigade fluviale de Karimama qui dépose. L’officier a pour nom Gounou Marigo Bio Nikki, placé en détention provisoire début mai 2024. À la barre, le militaire indique qu'il faisait le commerce de produits vivriers en dehors de son travail de marins. Il confie qu'à sa nomination, il n'a pas voulu décevoir son patron qui lui faisait confiance.
L'ex-chef de la brigade fluviale de Karimama reconnaît qu'il donnait par moment de l’argent à l’ex-chef d'état-major de la Marine en guise de cadeau et que cela ne dépassait pas son salaire. L’officier interpellé en mai 2024 a indiqué qu'il venait de finir sa formation de l’état-major quand il a été interrogé par la Brigade économique et financière (BEF) sur une somme de 200 000 FCFA qu'il a envoyé au patron par dépôt Momo. Le Marin affirme que les officiers de police judiciaire lui auraient déclaré qu'il s'agit de l’argent issu de la vente du carburant volé à la base navale de Cotonou.
Devant la BEF, le militaire indique avoir expliqué qu'il n'est pas en fonction à la base navale de Cotonou et qu'il est chef de la brigade fluviale de Karimama. L’officier a déclaré que lui qui était convoqué en tant que témoin s'est retrouvé embarqué dans un autre dossier impliquant l’ex-chef d'état-major major Jean-Léon Olatoundji. Le dossier a été renvoyé à huitaine, soit le jeudi 17 octobre 2024. C'est à cette date que la CRIET va se prononcer sur la demande de remise en liberté provisoire introduite en leur faveur, rapporte l'envoyé spécial de Libre Express.
Commentaires